Arracher le tapis et autres moments fondateurs
Présentation des récits de Claire Dumay
Postface de l'auteur
La narratrice est tiraillée entre deux exigences constitutives de son identité : ordonner le Vécu jusqu’à l’obsession, trouver des exutoires allant dans la direction de sa vraie nature. Une trentaine de textes constituent la matière du livre.
Claire Dumay est professeur de Lettres, c’est son deuxième livre à l’Atelier de l’agneau.
Sommaire
S O M M A I R E
Rites fondateurs
Les listes
24 poses
Le courrier d’usure
La nouveauté
Nos règles intimes
Mes ancres familières
Le bricolage
Le guichet
La radio
La laverie
Petit théâtre personnel
Le rayon parfumerie du Bon Marché
La folie ordinaire
La boucle et la chaudière
Le rouge à lèvres
Les cauchemars
Brouillages et entraves
Le savon liquide
Le distributeur de papier toilette
La piscine
La grasse matinée
Le jazz
Le haïku
Halètements et vertiges
Massacre de mouches
La peur
J’arrache le tapis
La Cinquième de Chostakovitch
Eloge de la vie conjugale
Le moustique
L’achat de la chemise
Dans mes pattes
La jalousie
Petit cabinet de curiosités alimentaires
Le restaurant indien
Le gingembre
Le yaourt
Les substances molles
Les gâteaux
Bonus
2 extraits du livre :
Le guichet (début du texte)
J’affectionne particulièrement tous ces lieux où je fais la queue, face à un guichet. J’ai le choix : à la SNCF, à la banque, au Trésor Public, à la MGEN, à la poste, au commissariat ...
Le plus souvent, c’est superflu, totalement pléonastique et vain, mais j’en fais une affaire de nécessité.
Aller au guichet, c’est tout d’abord un moyen de m’ancrer dans le monde extérieur, de m’intégrer à un flux que je n’ai pas initié, et dont je ne suis pas issue. Je me munis du ticket craché par le distributeur, et me coince là, parfaitement oisive. Tandis que j’observe tous les autres, je me sens éminemment libre au-dedans.
La folie ordinaire (début du texte)
Dès que je sors de mon quartier, je prononce à voix haute et forte, en pleine rue, des mots qui déferlent en dehors de toute logique, et me grisent de leur vertige. J’invente une nouvelle langue, délabre l’ancienne ; je fais se succéder des syllabes étranges, des néologismes qui avancent seuls, gouvernés par leur propre émulation. Je ne réfléchis rien, les mots s’engendrent, s’enchaînent, riment entre eux, accélèrent ; je déclame ce tourbillon sans gêne aucune. Cette veine s’avère prodigue, inextinguible même ; elle entrouvre mes cosses, défait toute forme de résistance. Je m’écarte de la ligne droite, éclabousse, sors de mes gonds ; je romps avec l’image sagement repassée qui me colle à la peau, pour mieux chiffonner l’apparence. J’ai à cœur de laisser éclater ce qui a été jugulé, amputé, sevré, et qui prend plaisir à jaillir. Je crois retrouver une forme de virginité, antérieure à l’aliment morose de l’éducation.
Je peux aussi chanter tout fort, imiter le cri d’un animal, passer d’une voix à une autre, mendier en pleine rue en déclamant un texte, en interprétant un air d’opéra ; simuler la folie, tenir des propos incohérents, grossiers, avec une grande libéralité.
Fiche technique
Prix éditeur : 17,00 €
Collection : proses
Éditeur : ATELIER DE L'AGNEAU ÉDITEUR
EAN : 9782374280004
ISBN : 978-2-37428-000-4
Parution :
Façonnage : broché
Poids : 136g
Pagination : 140 pages