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l'autre LIVRE

Jean-Yves MASSON

LA DANSE DEVANT L'ARCHE

de HENRI FRANCK

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 18/10/2019 | 22,00 €

« Depuis 1913, je tiens en grande estime le livre d’un écrivain mort jeune, Henri Franck, La Danse devant l’Arche, où l’expérience d’appartenir à une même génération a été célébrée pour la première fois dans les rythmes les plus puissants », écrivait Rilke le 13 mars 1922 à son jeune correspondant Rudolf Bodländer.
Issu d’une famille juive de Strasbourg installée à Paris depuis l’annexion de l’Alsace par l’Allemagne en 1870, entré à dix-huit ans à l’Ecole Normale Supérieure en 1906, Henri Franck (1888-1912) a laissé le souvenir d’un brillant jeune philosophe, proche de Bergson, et d’un poète exceptionnellement prometteur. Très tôt, il collabore à des revues prestigieuses et fait partie du cercle de la Nouvelle Revue Française dès sa fondation. A vingt ans, il rencontre Anna de Noailles, avec qui il a une liaison empreinte d’une grande admiration réciproque. C’est elle qui préfacera La Danse devant l’Arche, publiée aux éditions de la NRF au lendemain de sa mort prématurée.
Le présent volume rassemble pour la première fois la plus grande partie des écrits connus d’Henri Franck : son œuvre poétique, les articles qu’il publia, et un ensemble de lettres d’une très haute valeur littéraire qui nous restituent de façon saisissante son rayonnement et sa présence. On y a joint un ensemble de témoignages permettant de mieux cerner son importance et son originalité : notamment ceux de Léon Blum, d’Henri Bergson, d’André Spire, de Gabriel Marcel ou encore de son cousin Emmanuel Berl, dont il orienta la destinée.
Jeune intellectuel engagé, Henri Franck, qui fut l’un des premiers auteurs de sa génération à revendiquer son identité juive et française au lendemain de l’Affaire Dreyfus, apparaît comme un témoin majeur de son époque. Au fil de ses poèmes et de ses lettres, la séduction de sa personnalité demeure intacte par-delà le temps.

AU PAS INÉGAL DES JOURS

de SINIGALLI LEONARDO

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 10/05/2019 | 18,00 €

« Je dis parfois en plaisantant que je suis mort à neuf ans ; je vous dis, à vous mes amis, que le pont sur l’Agri s’écroula une heure après notre passage ; et toujours plus je me convaincs que tout ce qui m’est arrivé ensuite ne m’appartient pas. »
Né au début du 20e siècle dans une famille paysanne, au sud de la péninsule italienne, Leonardo Sinisgalli quitte très tôt sa famille pour poursuivre ses études à Caserte, à Naples puis à Rome. Devenu ingénieur, il travaillera à Milan tout en commençant à publier ses premiers poèmes. Dans toute son œuvre, il ne cessera de revenir aux paysages et aux coutumes de son enfance, qui nourriront toujours son imaginaire.
Devenu un poète reconnu et un critique d’art influent, il publie en 1945 ce premier livre de souvenirs où il évoque à la fois la Basilicate de ses premières années (qu’il préféra toujours appeler de son ancien nom latin, la Lucanie) et quelques-uns des épisodes marquants de sa jeunesse loin de son village natal, ainsi que ses périodiques retours pleins de nostalgie vers sa terre natale, auprès de ses parents vieillissants et de ses sœurs.
Ce livre envoûtant restitue l’atmosphère d’une époque et surtout d’un territoire immémorial comme seul un poète sait les évoquer.

SONNETS DE LA PRISON DE MOABIT

de ALBRECHT HAUSHOFER

Poésie (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 18/01/2019 | 20,00 €

Les Sonnets de la prison de Moabit d’Albrecht Haushofer occupent une place particulière dans la poésie allemande du xxe siècle. Né en 1903, professeur d’université, géographe réputé, spécialiste de géopolitique, Haushofer, sans adhérer au Parti nazi, avait occupé des fonctions officielles sous le IIIe Reich. Impliqué, comme bon nombre de ses amis, dans l’attentat manqué contre Hitler du 20 juillet 1944, il fut arrêté et incarcéré à la prison de Moabit, prison berlinoise tenue par les SS. C’est là qu’il composa les quatre-vingts sonnets qu’on retrouva sur lui après sa mort : il fut exécuté avec quatorze autres prisonniers dans la nuit du 22 au 23 avril 1945.
Publiés en 1946, ces Sonnets eurent tout de suite de fervents lecteurs et furent rapidement traduits dans de nombreuses langues. Une première traduction française parut en 1954, mais le texte sur lequel elle se fondait était encore fautif et incomplet. Ce n’est qu’en 1976 qu’une édition fiable vit le jour en Allemagne. Elle a servi de base à la présente nouvelle traduction.
Les Sonnets de la prison de Moabit ne sont pas l’œuvre d’un résistant de la première heure, mais d’un homme qui fait son examen de conscience et s’accuse de ne pas s’être opposé plus tôt à un régime qu’il désapprouvait depuis longtemps, mais en silence. Haushofer n’est tendre ni pour lui-même, ni pour son père, plus gravement compromis que lui. Ces sonnets sont le testament d’un homme qui sait qu’il ne sortira pas vivant de sa cellule : il y passe en revue les épisodes de sa vie, se remémore ses voyages, ses amitiés, ses amours, cherche à prendre exemple sur d’illustres persécutés (de Boèce à Thomas More), et se fraye un chemin vers la sérénité en s’inspirant surtout des sagesses orientales, dont il était familier.
Ce sont les circonstances qui ont fait éclore en Haushofer le poète. Ces quatre-vingts sonnets, aujourd’hui considérés comme un classique en Allemagne, suffisent pour lui assurer une place parmi les voix inoubliables du xxe siècle.

PAYSAGES DE L'ÂME

de Hugo VON HOFMANNSTHAL

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 05/10/2018 | 20,00 €

Célèbre pour ses poèmes dès l’âge de 17 ans, Hugo von Hofmannsthal (1874-1929) fut ensuite connu du monde entier en tant que librettiste des plus beaux opéras de Richard Strauss, du Chevalier à la rose à La Femme sans ombre. En dehors des pays de langue allemande, où son prestige littéraire est resté immense, cette renommée a longtemps éclipsé son œuvre propre. En 1927, le critique littéraire Charles Du Bos entreprit de faire découvrir au public français la diversité de son œuvre en prose en éditant un choix de textes où figuraient quelques-unes de ses plus belles œuvres, notamment La Lettre de Lord Chandos, qui a depuis conquis de nombreux lecteurs.
Quatre-vingt-dix ans plus tard, cette anthologie n’a pas pris une ride et garde tout son intérêt, non seulement parce qu’une moitié des proses qui la composent n’ont jamais été retraduites et que la traduction en est extrêmement soignée, mais aussi parce que le choix des textes et leur agencement ont été élaborés en étroite concertation avec Hofmannsthal, au point qu’on peut voir dans cet ouvrage une sorte d’autoportrait à destination des lecteurs étrangers.
Le fil conducteur de ce livre est la réflexion de Hofmannsthal sur la création poétique de son temps, sur l’écriture et la lecture des poèmes – ces « paysages de l’âme », comme les appelle un de ses personnages. Jamais le poète autrichien n’a cessé d’interroger, sous différents masques, les raisons qui l’avaient conduit, après dix années d’intense activité créatrice, à abandonner définitivement la poésie. Dès 1902, il cerne avec La Lettre de Lord Chandos l’essence paradoxale de la modernité littéraire : la même injonction venue des « choses muettes », qui donne naissance au poème, est aussi ce qui menace de rendre impossible la poésie, en instaurant une coupure irrémédiable entre le monde et la parole.
Les dialogues, lettres fictives, essais et conférences ici rassemblés explorent les conséquences de cette crise initiale et cherchent les moyens de la résoudre ou de la dépasser. C’est en cela que ce volume reste sans doute la meilleure introduction à la lecture de Hofmannsthal, l’un des grands classiques de notre temps.

LETTRES SUR LA POÉSIE

de William Butler YEATS

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 08/06/2018 | 22,00 €


En 1935, à soixante-dix ans, W. B. Yeats (1865-1939) est à l’apogée de sa célébrité. Prix Nobel de littérature en 1923, il est considéré comme un véritable monument national dans son Irlande natale et comme l’un des maîtres incontestés de la langue anglaise. Cependant, alors que sa santé se dégrade et qu’il ne lui reste plus que quelques années à vivre, il n’a pas devant lui un lent déclin mais un renouvellement extraordinaire de son génie créateur.
C’est cette vieillesse hors du commun qu’évoquent ces Lettres sur la poésie, restées jusqu’ici inédites en français. Elles ont été rassemblées par Dorothy Wellesley (1889-1956), l’amie et correspondante privilégiée de cette période, qui saura accompagner et aider le poète dans le parcours aussi glorieux qu’insolite de ses dernières années.
« Mon imagination est entrée en effervescence, lui écrit Yeats dans une des premières lettres de cette correspondance. Si j’écris encore de la poésie cela ne ressemblera à rien de ce que j’ai fait. » Les trois ans et demi qui vont suivre, vécus par le poète avec une intensité hors du commun, vont pleinement confirmer cette annonce.
Face à la vieillesse qui affaiblit son corps, Yeats entretient sans relâche l’ardeur intellectuelle qui l’habite, ne baisse les bras devant aucun des aspects de son époque qui l’indignent, utilise son immense célébrité pour rester jusqu’au bout un acteur de son temps. « Ma poésie, écrit-il à Dorothy Wellesley, naît tout entière de la fureur ou de la luxure. » Seuls trouvent grâce à ses yeux les créateurs qui, comme lui-même, refusent toute forme de passivité, dans leur œuvre comme dans leur vie.
Témoignage de premier plan sur l’intimité d’un grand poète, document précieux sur le processus de la création poétique, ce livre renferme surtout une extraordinaire leçon d’énergie.

Préface de Kathleen Raine. Traduit de l'anglais par Livane Pinet-Thélot avec la  collaboration de Jean-Yves Masson.

Edition annotée conmprenant  un index et un répertoire biographique des personnalités citées.

TOUT UN LIVRE, TOUTE UNE VIE

de MARIE VON EBNER-ESCHENBACH

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 14/11/2017 | 15,00 €

« Un aphorisme est le dernier anneau d’une longue chaîne de pensées », écrit Marie von Ebner-Eschenbach en tête du recueil de ses aphorismes, un classique de la langue allemande constamment réimprimé et traduit un peu partout dans le monde depuis cent ans, mais jusqu’ici inédit en français.
De 1880 à 1916 (date de l’édition définitive), cette grande romancière que l’on redécouvre aujourd’hui ne cessa d’augmenter et de remanier ce petit livre où elle concentra le meilleur de ses réflexions : un ouvrage devenu si populaire en édition de poche que certaines de ses sentences sont passées en proverbes.  
Les phrases de ce genre, si connues qu’on en a oublié l’auteur, la langue allemande aime à les appeler des « paroles ailées ». Cette expression s’applique particulièrement bien à la légèreté et à la vivacité de la grande styliste que fut Marie von Ebner-Eschenbach. Son art consommé de la maxime puise autant aux sources de la sagesse populaire qu’à celle des grands moralistes français. Dans leur concision, ses aphorismes révèlent une femme libre, ennemie des préjugés et lucide sur la difficulté de s’en affranchir, constatant par exemple que « les esclaves heureux sont les ennemis les plus acharnés de la liberté ».
Un petit livre, grand par les leçons de courage et de vie qu’il rassemble. Nul doute que bien des lecteurs sensibles en feront leur livre de chevet.

Issue d’une vieille famille aristocratique de Moravie, contemporaine exacte de l’empereur François-Joseph, Marie von Ebner-Eschenbach (1830-1917) fut la première grande romancière de la littérature autrichienne. Elle fut aussi une passionnée d’horlogerie, consacrant ses loisirs à restaurer de ses mains de précieuses montres anciennes – passion qui n’est sûrement pas étrangère à la précision de son style.

LA FOI TELLE QUE JE L'ENTENDS

de Hermann HESSE

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 22/09/2017 | 19,00 €

Dès sa jeunesse, Hermann Hesse a été hanté par les questions portant sur la spiritualité. Il n’a cessé tout au long de sa vie d’aborder ce sujet non seulement dans ses romans et ses nouvelles, mais aussi à travers de nombreux articles et conférences, dans ses poèmes, ainsi que dans sa correspondance.
Ce sont ces prises de position publiques ou privées que Siegfried Unseld, qui fut son ami, son éditeur chez Suhrkamp et l’un des meilleurs connaisseurs de son œuvre, a entrepris de réunir dans le présent livre, quelques années après la mort de Hermann Hesse. Cet ouvrage capital, qui éclaire et complète l’œuvre romanesque, n’avait encore jamais été traduit en français.
On y découvre un précurseur dans la connaissance des spiritualités de l’Extrême-Orient, guettant la parution des traductions qui permirent enfin au public allemand de les découvrir, mettant en garde ses lecteurs contre la mode superficielle du zen en Europe, mais décelant aussi dans la curiosité nouvelle pour les traditions extra-européennes le signe d’un très profond besoin de renouvellement des traditions religieuses.
Élevé dans une foi protestante d’inspiration piétiste, attaché au message chrétien mais profond connaisseur du bouddhisme, Hesse cherche un point de convergence entre les grands courants spirituels avec le sentiment qu’il est urgent de répondre à la crise morale de l’Occident. S’il est vrai que cette crise n’a fait que se confirmer depuis lors, son message est, plus que jamais, actuel.

Hermann Hesse (1877-1962) est l’un des principaux romanciers allemands du vingtième siècle, et aujourd’hui encore l’un des plus lus à travers le monde.  Il a reçu en 1946 le prix Nobel de littérature.

LE LIVRE DES AMIS

de Hugo VON HOFMANNSTHAL

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 17/10/2016 | 18,00 €

En 1922, Hofmannsthal publie de manière presque confidentielle Le Livre des Amis, un recueil d’aphorismes qui connaîtra rapidement une diffusion beaucoup plus large que son auteur lui-même ne l’imaginait, et peut-être ne le souhaitait. Dans ces pages, le poète autrichien mêle ses propres pensées, tirées de ses carnets intimes, à celles qu’il a rencontrées chez les auteurs qu’il aime le plus. Les "amis" que désigne le titre sont donc aussi bien ses propres lecteurs que les écrivains de tous les temps, qui forment autour de lui une sorte de « collège invisible ».

Le Livre des Amis est un livre magique, dont la profondeur ne se dévoile qu’avec le temps: ceux qui l’ont lu ne cessent d’y revenir. Il est peut-être aussi la meilleure initiation à l’œuvre de Hofmannsthal, grand esprit doublement attaché à sa patrie autrichienne et à la défense de la culture européenne au lendemain de la Première Guerre mondiale. 

Hugo von Hofmannsthal (1874-1929) devint célèbre dans les milieux littéraires viennois à dix-sept ans pour ses premiers poèmes et fut très tôt reconnu dans tous les pays de langue allemande comme l’un des plus grands poètes de son temps. Il cessa assez tôt d’écrire de la poésie pour se consacrer au théâtre, devenant notamment le librettiste des opéras de Richard Strauss, avec qui il fonda le Festival de Salzbourg. Il est également l’auteur de contes (La Femme sans ombre), de nouvelles, d’un roman (Andreas), et de très nombreux essais ou textes en prose inclassables dont le plus connu reste la Lettre de Lord Chandos.

Cette édition s'accompagne de notes indiquant les sources des citations ainsi que d'un index des auteurs cités.

LA FÉE AUX LARMES

de Jean-Yves MASSON

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 17/10/2016 | 14,00 €

La nuit était de plus en plus épaisse. De lourds oiseaux nocturnes passaient avec un froissement d’ailes dans le noir ; la lune avait commencé à baisser et sa clarté s’était voilée derrière des nuages. Aurore ne voyait plus bien où elle mettait les pieds. Elle trébucha à plusieurs reprises, poussant un cri chaque fois qu’une branche venait à lui griffer le visage. La nuit semblait interminable, le matin encore bien lointain. Aurore avait maintenant très soif et s’aperçut qu’elle n’avait même pas songé à emporter de quoi boire ; la gorge sèche, elle eut l’impression qu’elle allait mourir là, sans avoir découvert le secret des larmes.
— Hélas ! ma mère, mon père bien-aimés, s’écria Aurore, que n’êtes-vous auprès de moi pour me guider ? Où êtes-vous à présent ? Voyez-vous votre fille qui cherche sans la trouver la fée présidant à toute naissance ? Ne pouvez-vous me faire un signe pour me mettre sur le chemin ? Que ne donnerais-je pour pouvoir verser une larme ! Et comme j’ai soif !

Jean-Yves Masson, né en 1962, a publié des poèmes (Onzains de la nuit et du désir, Neuvains du sommeil et de la sagesse, Cheyne Éditeur ; Poèmes du festin céleste, L’Escampette), des romans (L’Isolement, L’Incendie du théâtre de Weimar, Verdier) et des nouvelles (Ultimes vérités sur la mort du nageur, Verdier, Goncourt de la Nouvelle 2007). Il s’est inspiré d’une légende alsacienne pour écrire ce conte qui s’adresse non seulement aux enfants, mais à l’enfant que tout adulte porte en lui.

Cette édition est illustrée de gravures et de lettrines rares du XIXe siècle qui cherchent moins à illustrer le récit qu'à prolonger la rêverie.

MAM'ZELLE GNAFRON

de ALBERT CHANAY, HIPPOLYTE POLINARD, TONI TARDY, PÉLISSIER, PIERRE ROUSSET, MANCARDI, THOMAS BAZU, CATHERIN BUGNIARD, JOSEPH DES VERRIÈRES, GEORGES MAZUYER, P. FOURNIER, BISTANCLAQUE

Éditions de la Coopérative (COOPÉRATIVE (ÉD. DE LA)) | Paru le 19/04/2016 | 21,00 €

Gnafron. – T’as donc pas vu dans les journaux de Paris qu’y paraît que le lyonnais c’est pas du français ?
Guignol. – Et t’as cru ça, grande bête ! Y sont jaloux pasque c’est nous que le parlons le mieux, le français, le plus vieux. Te sais donc pas que nous étions capitale avant eusses ; que nous faisions de vin quand y buvaient pas seulement du râpé ; qu’y avait déjà chez nous une Compagnie des Eaux avec ses tuyaux sur des arqueducs grands comme de cathédrales, que leur Paris était encore qu’un village en bois au bord d’un gaillot si peu conséquent qu’on le traverserait en quatre brassées. Ils ont la langue de tout le monde, ces faiseurs de fufus ; nous, nous parlons comme nos anciens, et le gone qu’en aurait honte, ça serait qu’un mauvais gone, un mauvais Français, un Barrabas, un Judas. T’entends ? Faut pas plus renier son parler que son vin.

Créé au tout début du XIXe siècle par le marionnettiste Laurent Mourguet (1769-1844), Guignol fut pendant plus d’un siècle le porte-parole du petit peuple de Lyon, et surtout des « canuts », les  ouvriers de la soierie. Au plus fort de leur popularité, jusque dans les années 1950-60, Guignol et son inséparable ami Gnafron furent au cœur d’une intense production théâtrale, due à de très nombreux auteurs.
En 1925, la société des Amis de Guignol édita à Lyon, à tirage très limité, un choix des meilleures pièces écrites au cours des soixante années précédentes, pour compléter le premier répertoire « classique » rassemblé par Jean-Baptiste Onofrio en 1865. C’est ce recueil rarissime, plein d’inventions savoureuses, que nous rééditons aujourd’hui.