L'Occident est-il encore seulement capable de déchiffrer ce que la Russie a à lui dire ? Alors que la course en avant de l'hypermodernité achève de désorienter une Europe meurtrie et de la couper de ses racines séculaires, le pays des tsars, quant à lui, incarne plus que jamais un horizon permanent, un nord impérieux.
Quelle voie pour l'Europe ? Anna Gichkina, depuis sa double culture, détaille pour nous les ressorts d'un éloignement et explore les particularités des deux filles de l'Eglise que sont la Russie et l'Europe occidentale, à travers la France.
La patrie de Tolstoï et de Dostoïevski a su conserver ce qu'un Occident amputé de lui-même, par souci d'universalisme, s'est consacré à déconstruire. Selon l'auteur, la Russie nous révèle nos maux à travers son mystère, pour peu que l'on prenne la peine de tourner notre regard vers lui.
La première partie de l'essai montre qu'en Occident, le temps a pris le pas sur l'Éternité. Abandon de l'héritage chrétien, religion des Droits de l'Homme : notre civilisation s'abîme dans la perpétuité d'une chute où l'homme lui-même se trouve sacrifié sur l'autel de l'eugénisme. La deuxième partie propose, en miroir, de scruter l'âme russe comme manifestation de l'Éternité supérieure au temps. Le mystère ne se comprend pas, il se contemple à travers le chaos historique, la force de l'orthodoxie, la profondeur de la littérature.
Cet essai d'Anna Gichkina est une semonce : il nous faut sortir le nez de notre buzz, s'extraire de notre présentisme, et renouer avec ce désir d'éternité qui fait l'homme.